samedi 23 mars 2013

Droit de réponse


Un article sorti récemment sur les relations des Français avec les Québécoises a interpellé une de mes amies, compatriote importée également, et elle m'a demandé si je serais intéressée à parler de mon expérience en tant que Française avec un Québécois. Alors je vais tenter de me prêter au jeu sous forme de réponse à l'article en question.
1/ La question du physique
Tout d'abord, un physique masculin qui plaît en France ne plaît pas forcément au Québec, et inversement. Au Québec, comme en Australie par exemple, le corps lui-même est important. Ainsi, les Québécoises apprécient particulièrement les hommes « bien bâtis » avec de gros muscles et des tatouages. Par exemple, les sportifs et les « bad boys » sont souvent bien vus. En France, l'image est avant tout un vecteur de transmission du statut social. Ainsi, même si tous les goûts sont dans la nature, les Françaises (de plus de 22 ans) préféreront plutôt le jeune cadre dynamique avec une silhouette effilée en costume-cravate. Des muscles trop développés évoqueront plutôt une condition ouvrière ou paysanne. (Pierre Chaigneau)
Venant de la Côte d'Azur, temple du superficiel et du paraître, je ne peux que constater qu'au Québec, les regards sont moins accusateurs. La rudesse de l'hiver et l'habillage en multi-couches y sont sûrement pour beaucoup : difficile de faire un défilé de mode emmitouflée dans son manteau, cachée sous une tuque et une grosse écharpe!  L'image n'a pas la même importance, je suis peut-être encore naïve, mais je vois beaucoup plus de tolérance ici face à un handicap ou un physique disgracieux, moins de jugements sur la manière dont les gens s'habillent, plus d'ouverture vers la personne elle-même. L'auteur me fait rire avec son stéréotype de douchebag arborant des gros muscles et des tatouages, mais en effet, les tatouages, piercings et autres altérations corporelles sont choses communes et moins jugés. Je pense qu'à mon travail, au moins 25% des employé(e)s ont des tatouages et personne n'en fait mention. Moi-même j'arbore une belle crinière fuchsia et je ne reçois aucun regard de travers, alors que je ne suis pas certaine que ce serait le cas en France, surtout dans un travail de comptabilité. Cependant, il y a une véritable culture du "être en forme et en santé", de pratiquer différents sports tout au long de l'année, et donc de prendre soin de soi. J'avoue que les Québécois sont plus en shape que les Français, et quand je vois mon chum abattre un arbre en quelques coups de hache ou un de ses amis faire des compétitions de bûcherons.... je me dis que c'est vraiment une culture différente!

2/ L'humour
En revanche, s'il y a une chose que les Français ne négligent pas, c'est bien la conversation. En particulier, le second degré est souvent l'élément de base de leur humour. Seul problème : les Québécoises y sont généralement peu habituées. Nombreuses sont celles qui s'arrêtent au sens littéral, et qui concluent donc (logiquement) que le Français est pour le moins bizarre. C'est d'autant plus vrai qu'il ne va typiquement pas montrer par ses mots ou ses expressions qu'il opère dans le registre de l'humour. (Pierre Chaigneau)
Je suis forcée de l'admettre, nous n'avons pas le même humour, et ce, que ce soit dans des relations intimes ou pas. Au travail, je me rends compte que certaines de mes pointes de second degré ne sont pas toujours comprises, et quand je suis rendue à devoir expliquer ma blague, elle a déjà perdu tout son côté humoristique! Ceci dit, je pense que le sens de l'humour est très personnel à chacun, si je montre à mon chum un passage de De Funès, un sketch des Inconnus, des Nuls ou des Bronzés, il ne va pas rire. Inversement, il me montre parfois des vidéos qui le font beaucoup rire et je comprends difficilement ce qui est drôle..Mais au delà de ça, je pense que c'est surtout une question de culture audiovisuelle différente, on n'a pas grandi avec les mêmes émissions ni les mêmes films, ni surtout les mêmes références! Quand on est allés ensemble au spectacle de Mike Ward, celui-ci faisait des blagues sur des personnes que je ne connaissais pas, mais ça semblait drôle puisque toute la salle riait!

3/ Les joutes verbales
Par ailleurs, les Français argumentent volontiers. Une joute verbale est séduisante en France. Elle permet à chacun de s'illustrer par ses compétences linguistiques et éristiques, sa culture, son humour (notamment au deuxième degré, cf. le point ci-dessus), et sa capacité à raisonner. Par ailleurs, un certain conflit est séduisant par le piment qu'il injecte dans la relation et l'adrénaline qu'il suscite. Au Québec au contraire, le conflit interpersonnel ouvert suscite généralement des réactions de malaise ou de rejet. (Pierre Chaigneau)
Alors oui effectivement, d'ailleurs mon boss m'a déjà "reproché" un de mes commentaires mais a classé très vite l'affaire en mettant ça sur le coup d'une "différence de culture". Cependant, dans mon couple actuellement, je ne suis pas celle qui argumente le plus, mais je sais que nos grandes discussions font sourire quelques-uns de nos amis :)  

4/ Les techniques d'approche
Même le premier contact entre un Français et une Québécoise est souvent délicat. En effet, le processus de séduction opère différemment en France et au Québec. En France, il commence presque toujours de façon détournée, par exemple par un argument, une moquerie, ou une référence culturelle -- comme expliqué ci-dessus. Cela tend à désorienter les femmes québécoises, qui s'attendent à une première approche beaucoup plus directe, et sont (bizarrement) surprises de se faire insulter par un inconnu. (Pierre Chaigneau)
On se fait très facilement aborder dans n'importe quelle situation du quotidien (dans la file de l'épicerie, à la patinoire, dans la rue... faut dire, il y en a qui ont la jasette facile!) que c'est rendu difficile de cerner une technique de séduction ou juste une envie de parler. Dans la majorité des cas, l'âge de l'interlocuteur fait office de baromètre, mais au delà de ça, les intentions ne sont pas toujours claires de la part des Québécois  D'ailleurs, on dit souvent que ce sont les Québécoises qui cruisent (draguent) et les gars attendent. Dans ma période de célibat ici, c'est une des choses que j'ai trouvé assez déconcertante, puisque les "codes" ne sont pas les mêmes. Je me suis déjà fait offrir des verres sans aucune intention derrière, alors qu'en France, je me serais doutée que le gars en question attendait quelque chose en contrepartie...

5/ La femme gère-mène
La relation de couple elle-même est très différente. Au Québec, on dit souvent que la femme « gère » et « mène » le couple. En France, comme dans les autres pays latins, c'est plutôt l'homme qui endosse ce rôle. (Pierre Chaigneau)
Faut croire que j'avais une prédisposition génétique à être Québécoise...

6/ Le couple
 « être en couple » n'est qu'une expression amusante qui ne change absolument pas la perspective d'un Français sur une relation, au grand désespoir d'une Québécoise qui s'attend justement à un changement fondamental.(Pierre Chaigneau)
Je reste vraiment surprise du nombre de couples qui sont ensemble depuis leur secondaire (collège), qui ont des enfants très tôt, et qui mettent la priorité sur la fondation d'une famille avant de réfléchir à leur stabilité émotionnelle et financière. Pour moi, emménager ensemble était une grosse étape, mais d'après ce que j'entends autour de moi, il n'est pas rare d'emménager avec son chum au bout de quelques semaines... 

Conclusion personnelle

Mon chum est un Québécois pur souche, il porte des chemises carreautées et bûche du bois à la hache...Blague à part, c'est certain que nous avons des différences culturelles, mais elles ne sont pas insurmontables. Je manque m'étouffer quand il passe du foie gras au micro-ondes et lui ne comprend pas la subtilité d'un verre de champagne, tout comme je ne peux pas me résoudre à boire du lait avec mes pâtes. Mais au delà de ces différences, ce qui importe est la personnalité de chacun. Le fait d'avoir quelques amis Français sous la main me donne cet équilibre culturel, je peux ressasser avec eux les vieux souvenirs de jeunesse et en créer de nouveaux avec mon chum. La plus grosse différence, je la vois au niveau de l'indépendance au sein du couple, et je le constate aussi avec mes amis Québécois. Chacun reste un être à part entière et on fait nos vies en parallèle, on se rejoint à la maison mais il n'est pas rare qu'on fasse des activités chacun de notre côté. Pour ma part, j'y trouve un certain équilibre.

C'est vrai que parmi mes amis proches, aucun couple franco-québécois n'a tenu sur la durée, mais ça prend toujours une exception pour confirmer la règle, non?


2 commentaires:

Beatrick a dit…

Mais quel est donc ce CHUM qui apparait, sorti de nulle part ? Tu n'en parles pas du tout dans ton blog, c'est dommage...

Aline a dit…

ahhh oui, il fait jouer la carte du respect de sa vie privée ;)